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Ma gencive saigne. Dois-je m'inquiéter?

Le Docteur, empoignant son patient inquiet : « t’inquiète pas, fiston, on va soigner cette gencive malade ».
Le Docteur, empoignant son patient inquiet : « t’inquiète pas, fiston, on va soigner cette gencive malade ».

La version courte pour ceux qui sont dans les transports ou entre deux trucs : si l’espace entre votre ongle et votre doigt saignait, vous inquiéteriez-vous ? Moi oui. Alors pourquoi pas votre gencive, qui de surcroît côtoie tous les jours des milliards de microbes ?

La version longue, pour ceux qui veulent être sûrs de bien comprendre :

Les saignements de la gencive doivent bel et bien attirer votre attention. Il peut s’agir d’une simple blessure, causée par le brossage, le fil dentaire ou une brossette, mais le plus souvent, et de loin, ils constitueront l’un des symptômes d’une gingivite si seule la gencive est affectée, ou d’une parodontite si l’ancrage de la dent commence à fondre. Le saignement gingival reflète alors une souffrance de votre gencive peinant à se défendre contre une charge microbienne trop importante (1). 


"Lorsque la gencive est inflammatoire autour de toutes les dents, la surface malade équivaut à celle de la paume de la main."


Les facteurs en jeu

Entendons-nous bien, des microbes, il y en a de façon naturelle un très grand nombre dans nos bouches. C’est ainsi, et surtout c’est normal. Il n’y a là rien d’inquiétant et cela ne peut être un motif d’angoisse. Néanmoins, lorsque la quantité de bactéries autour des dents, à proximité de la gencive, dépasse ce que notre organisme est capable de gérer, les problèmes commencent. Il y a dans cette phrases deux informations importantes : le surnombre de bactéries pose autant problème que le déficit de défense de l’organisme. On peut avoir autant de bactéries autour de ses dents que son collègue de boulot, mais si l’on se défend moins bien que lui, alors les saignements apparaîtront plus vite. Les facteurs influençant positivement les saignements peuvent être le diabète (2), le stress (2), l’obésité (2,3), peut-être même le surpoids (3), le manque de sommeil (4), le manque d’activité physique (5), les carences vitaminiques (2), une mauvaise alimentation (5)… Et à l’opposé, le tabac masquera le saignement (6). Certains pourraient s’en rassurer en s’imaginant que l’absence de saignement équivaut à la santé retrouvée, or l’inquiétude devrait prévaloir. En masquant ces saignements, le tabac masque le principal signal d’alarme des maladies gingivales tout en étant l’un de ses principaux facteurs de risque (2,6).

« P’tit gars, je crois bien qu’on est passé à côté de tes saignements de gencive. »
« P’tit gars, je crois bien qu’on est passé à côté de tes saignements de gencive. »

Le mécanisme conduisant au saignement

Pour se défendre contre les bactéries qui l’assaillent, le sillon entre la dent et la gencive produit un liquide contenant des cellules de défense. Ce liquide s’appelle le fluide gingival. Lorsque la charge bactérienne augmente, des processus inflammatoires impliquant le système immunitaire se mettent en branle. Des cellules de défense sont dès lors acheminées vers le site infectieux. Pour augmenter le transfert de ces cellules, le diamètre des vaisseaux sanguins augmente. Cela se traduit par une gencive plus rouge. Il suffit d’une dizaine de jours pour qu’une zone délaissée par le brossage prenne cette couleur rosée (1). Ensuite, plus l’inflammation augmente, plus les saignements se font aisément, d’abord au brossage, puis dans les cas les plus avancés, spontanément. Certains se retrouvent à avoir un goût de sang dans la bouche en « aspirant » leur gencive entre les dents, d’autres ont un goût de sang le matin au réveil, d’autres encore tachent leur oreiller ou crachent du sang. Bref, plus ça saigne facilement, mois c’est bon signe.

La comparaison qui met tout le monde d’accord

Lorsque la gencive est inflammatoire autour de toutes les dents, la surface malade équivaut à celle de la paume de la main (7,8). Et si la paume de votre main était rouge tous les jours avec parfois, ou souvent, ou tout le temps des saignements, il est pratiquement sûr que vous prendriez vos jambes à votre coup pour prendre un avis médical le plus vite possible.

« Si ma main saigne, je m’inquiète. Si ma gencive saigne, je m’inquiète aussi. »
« Si ma main saigne, je m’inquiète. Si ma gencive saigne, je m’inquiète aussi. »

Alors, là où l’on a de la chance, c’est que lorsque la gencive saigne, ce n’est que rarement une urgence médicale. N’attendez pas pour autant plusieurs mois pour agir. Car si ce saignement s’accompagne d’une perte osseuse, ce que vous ne pouvez pas constater sans des examens dentaires réalisées par un dentiste, cette perte osseuse est irréversible. Ce sera le début de la pente infernale vers la perte de vos dents. Et comme on dit chez moi, sans vos dents, vous n’aurez plus que vos yeux pour pleurer.


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La parodontite

Facteurs de risque

Foire aux questions



Références bibliographiques

  1. Loe H, Theilade E, Jensen SB. Experimental Gingivitis in Man. J Periodontol. 1965;36:177-187. http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/14296927.
  2. Genco RJ, Borgnakke WS. Risk factors for periodontal disease. Periodontol 2000. 2013;62:59-94. doi:10.1111/j.1600-0757.2012.00457.x.
  3. Keller A, Rohde JF, Raymond K, Heitmann BL. Association between periodontal disease and overweight and obesity: a systematic review. J Periodontol. 2015;86(6):766-776. doi:10.1902/jop.2015.140589.
  4. Vishakha Grover, Ranjan Malhotra HK. Exploring association between sleep deprivation and chronic periodontitis A pilot study. 2015;19(3):304-307. doi:DOI: 10.4103/0972-124X.154173.
  5. Bawadi HA, Khader YS, Haroun TF, Al-Omari M, Tayyem RF. The association between periodontal disease, physical activity and healthy diet among adults in Jordan. J Periodontal Res. 2011;46(1):74-81. doi:10.1111/j.1600-0765.2010.01314.x.
  6. Bergström J, Preber H. Tobacco Use as a Risk Factor. J Periodontol. 1994;65(5):545-550. doi:10.1902/jop.1994.65.5s.545.
  7. Nesse W, Abbas F, Van Der Ploeg I, Spijkervet FKL, Dijkstra PU, Vissink A. Periodontal inflamed surface area: Quantifying inflammatory burden. J Clin Periodontol. 2008;35(8):668-673. doi:10.1111/j.1600-051X.2008.01249.x.
  8. Hujoel PP, White B a, García RI, Listgarten M a. The dentogingival epithelial surface area revisited. J Periodontal Res. 2001;36(1):48-55. doi:{10.1034/j.1600-0765.2001.00011.x.